Respire Aloki - chapitre 4
La découverte
Aloki s’est réveillée joyeuse ! Aujourd’hui, la jeune fille se prépare pour une sortie avec sa mère et ses tantes. Elle a un peu l’impression d’enfiler un déguisement. Sa maman l’aide à ajuster les pans d’un sari aux couleurs éclatantes.
Aloki trouve le vêtement étrange.
-Je ne peux vraiment pas porter mes pantalons ? demande Aloki.
-Tes pantalons ont besoin d’un bon lavage ma chère. Les escapades dans le jardin ne sont pas tendres pour les vêtements. À ce rythme, ils ne seront bientôt plus que des guenilles !
Depuis quelques semaines, Aloki passe des heures à explorer le jardin. Elle y est heureuse. Parfois, elle s’accorde même un moment de recueillement devant l’autel ancestral. Mais ce que préfère Aloki, c’est grimper à son arbre, elle a même sa branche favorite. Une branche courbée comme un hamac, lourde et solide, parfaite pour s’y étendre. De là-haut, Aloki peut observer la nature du jardin à sa guise. Entre le ciel infini et les fourmis qui grimpent l’écorce en colonnes, il y a tout un monde à découvrir.
Aloki vêtue de son nouveau sari aux couleurs éclatantes rejoint ses tantes. En la voyant, les femmes s’emballent !
Sa tante Deepali est la première à poser une main sur chacune des épaules de la jeune fille. Elle la regarde de ses yeux brillants.
-Comme tu es belle, ma chérie ! Tu ressembles à une véritable princesse !
Aloki observe alors ses tantes et sa mère. Ensemble, ces femmes forment un groupe solidaire, rempli de courage et d’amour. C’est comme si ensemble, elles formaient quelque chose d’autre, quelque chose de plus. Et elles sont bruyantes. Cacahouète qu’elles sont bruyantes! Parfois elles discutent très tard dans la nuit et peuvent éclater de rire à tout instant. Comment font-elles pour avoir continuellement quelque chose à se raconter ? Aloki se sent privilégiée de se retrouver dans ce cercle harmonieux, parmi ces femmes qui s’aiment.
Aloki n’a jamais vu autant de personnes vouloir entrer dans une seule voiture ! Tante Deepali s’installe au volant. Serrée entre ses tantes, la route parait longue pour Aloki. Elle ne peut pas voir grand-chose et la chaleur est pénible. Comme si ce n’était pas suffisant, ses tantes font jouer de la musique à tue-tête et chantent en cœur avec un enthousiasme à réveiller les morts.
La joyeuse troupe arrive enfin à destination. C’est une coopérative de compost, un projet mis sur pied par tante Aditi. Tante Aditi s’empresse de leur faire visiter le lieu. :
-Ici on fabrique le meilleur compost de la région, un compost qui permet d’enrichir les sols, de les fertiliser. Sans utiliser de produits chimiques !
Tante Aditi connait tellement de choses sur l’agriculture et la botanique. Elle est ingénieure en agronomie, elle a même fait des études en Australie. Maman dit qu’elle est une sommité mais Aloki n’est pas certaine de ce que ça veut dire. À la maison, il a un tas de magazines dans le salon, tous avec un article qui parle de tante Aditi. Il y a même sa photo en page couverture d’un exemplaire du Nature Magazine. Aditi ne s’arrête pas de parler, comme si elle avait peur de manquer de temps pour tout dire. Il ne faut pas trainer pour réussir à la suivre !
-Et voici les hangars où sont empilés de grands tas de matières organiques qui doivent être remués et retournés. C’est tas sont composés par exemple de pelures de légumes et de restants de table. Là c’est le tri des résidus que les gens nous apportent, notre matière première ! Et tout derrière, l’emballage. Les sacs qui servent pour l’emballage sont biodégradables et fabriqués à partir de fécule de riz et de la fibre de canne à sucre.
Notre coopérative attire aussi des collaborateurs : Les jardins au fond, sont utilisés par les étudiants de l’université pour étudier l’efficacité de nos mélanges et comme les fleurs attirent les abeilles, une petite entreprise de miel est venue aussi s’installer avec nous. On peut observer tout le cycle de la vie sur ce site. C’est fascinant, non ? Bientôt nous allons commencer un projet qui va te surprendre, nous allons récupérer de l’urine, un excellent fertilisant riche en nitrogène et en phosphore. Dans la nature, rien n’est inutile si on considère les choses dans leur ensemble.
Au moment du départ, une dame insiste pour qu’on emporte de grands pots de miel. Tante Deepali a beau protester, impossible de refuser ! Elles repartent les bras chargés de pots de miel aux reflets dorés.
Alors que le jour laisse lentement place à la nuit, l’obscurité envahit le ciel et l’air se rafraîchi. Aloki s’endort dans la voiture, un pot de miel sur les genoux. Sur le chemin du retour, les tantes de la jeune fille sont silencieuses, toutes aussi fatiguées que la petite Aloki.
Une fois de retour à la maison, Aloki se dirige vers son lit, mais elle ne réussit pas à retrouver le sommeil. Elle se sent un peu anxieuse. Elle se demande si elle pourra aussi un jour contribuer à un monde meilleur comme tante Aditi.