Le voyage en soi - chapitre 3
La rencontre
Ce matin, Aloki s’arrête à nouveau devant la pièce au balcon. Encore ce matin, Dadda est assis sur un coussin à sa place habituelle, les jambes croisées pour la position du lotus. Face aux hautes montagnes de l’Himalaya, il reste immobile. Il doit sans doute méditer.
-Aloki ? Ne sois pas aussi timide ! Approche, tu ne me déranges pas. Il me reste encore plusieurs matins pour méditer, mais ce qui me fait le plus plaisir au monde, c’est de passer du temps avec toi.
Aloki s’approche de son grand-père et s’assoit à ses côtés, face au Nord.
-C’est beau n’est-ce pas ? lui demande Dadda.
Aloki hoche la tête.
-Saisissons la chance immense que nous avons en ce moment, c’est important. Tu comprends ce que je veux dire ? Nous sommes ensemble, juste nous deux pour un rare moment et dans le pays de nos ancêtres. Quel bonheur de t’avoir avec moi.
-Je vais peut-être te surprendre, ma petite Aloki. Lorsque tu m’as vu ici pour la première fois, tu as sans doute cru que je venais souvent sur ce balcon n’est-ce pas ?
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Aloki hoche la tête.
-Saisissons la chance immense que nous avons en ce moment, c’est important. Tu comprends ce que je veux dire ? Nous sommes ensemble, juste nous deux pour un rare moment et dans le pays de nos ancêtres. Quel bonheur de t’avoir avec moi.
-Je vais peut-être te surprendre, ma petite Aloki. Lorsque tu m’as vu ici pour la première fois, tu as sans doute cru que je venais souvent sur ce balcon n’est-ce pas ? En fait, je ne viens m’assoir ici que depuis très peu de temps. Ces montagnes, Aloki, ça faisait 30 ans qu’elles étaient cachées par la pollution et le smog. Avec cette pandémie, les usines de la région se sont arrêtées et on peut de nouveau admirer les montagnes à partir d’ici. Les gens ont tellement été impressionnés que la nouvelle a fait le tour du monde ! Ce balcon c’est le meilleur endroit pour les admirer tu ne trouves pas ?
La vie est remplie de ces événements particuliers, comme l’apparition de ces montagnes, comme ta présence en ce moment à mes côtés. Ce sont des moments à chérir et garder en soi pour mieux traverser la vie. Regarde bien ces montagnes, comme si tu voulais en faire une photo qui restera dans ta mémoire pour toujours. Commence par observer celle qui est là plus à gauche. Ensuite, déplace ton regard vers la droite, puis de haut en bas. Observe bien chaque détail, de chacune d’entre elles.
Aloki trouve ça long d’observer chacune des montagnes. Parfois, elle est si distraite qu’elle doit recommencer du début. Dadda pose sa main sur son avant-bras un moment.
-Maintenant, ferme les yeux. Imagine les montagnes que tu viens d’observer. Tu vois, même dans ton imagination, les montagnes sont toujours aussi belles à regarder.
C’est intéressant cette idée de capturer des photos dans sa mémoire. Aloki constatera plus tard dans sa vie un autre phénomène surprenant : lorsqu’elle imaginera les montagnes, elle pourra aussi sentir la main chaude de Dadda sur son avant-bras, comme si elle y était toujours.
-Même si un jour je ne vois plus les montagnes, je vais continuer à venir m’assoir ici et les imaginer. Même après ton retour au Canada, je vais continuer à les regarder avec toi Aloki, ma petite fille. Et toi, tu sauras que chaque matin, je pense à toi.